Pour le moment, on ne peut pas dire que l’on soit écrasés par le Soleil, et c’est peu dire ! Depuis la fin de l’hiver et ce printemps, nous avons été littéralement noyés sous la pluie. Des épisodes pluvieux assez exceptionnels qui continuent et qui ont déjà marqué le début de la saison estivale. Des cumuls de plus de 200 mm ont été enregistrés dans les Alpes et le Massif central, des inondations ont touché plusieurs régions, notamment dans le Gard et les Deux-Sèvres. Des orages impressionnants ont frappé plusieurs communes du pays le 19 juin… Que se passe-t-il ?
Contrastant avec les étés récents marqués par des canicules et une sécheresse prononcée, cette période estivale est bien différente des autres, vous ne rêvez pas. Ce phénomène est dû à une combinaison de divers facteurs météorologiques et climatiques que nous allons décortiquer ici.
Une atmosphère perturbée à grande échelle
La circulation atmosphérique globale ou circulation générale de l’atmosphère (CGA) a joué un rôle prépondérant dans la configuration météorologique de cet été. La CGA est le mouvement à grande échelle des masses d’air qui entourent la Terre. Cette circulation complexe est le résultat de l’interaction entre plusieurs forces : le rayonnement du Soleil, la force de Coriolis due à la rotation de la Terre et la gravité. Celle-ci influence la redistribution de la chaleur et de l’humidité à la surface de la Terre et a été perturbée par plusieurs facteurs.
Les vents venant de l’ouest ont dominé sur l’Europe, apportant avec eux des zones de basse pression qui causent des perturbations et des pluies. Ces dernières ont engendré des perturbations récurrentes et des précipitations persistantes sur l’ensemble du continent.
En outre, des variations atmosphériques à grande échelle, comme l’Oscillation Nord-Atlantique (ONA) et l’Oscillation multidécennale du Pacifique (PDO), ont influencé ces schémas de circulation. L’ONA est une fluctuation naturelle de la pression atmosphérique au-dessus de l’Atlantique Nord qui affecte directement les précipitations en Europe. La PDO, quant à elle, est un cycle naturel de variabilité de la température de surface de l’océan Pacifique qui oscille entre des phases chaudes et froides sur une période d’environ 20 à 30 ans, influençant les modèles climatiques à grande échelle dans l’hémisphère nord.
Quant à l’ENSO (El Niño – Southern Oscillation), bien que son influence soit moins directe, peut également perturber les schémas météorologiques globaux et la circulation atmosphérique. Même s’il était en phase neutre cette année (températures de surface de la mer dans l’océan Pacifique équatorial étaient proches de la normale), il est possible que celui-ci ait eu une influence sur la situation climatique.
Un autre grand coupable dans la modification de cette dynamique est le réchauffement climatique. Celui-ci, réchauffant anormalement les océans, entraîne une augmentation de la vapeur d’eau atmosphérique et alimente ainsi la formation de nuages et donc le risque de précipitations.
Une mer Méditerranée inhabituellement chaude
Les conditions régionales ont joué un rôle déterminant dans la configuration météorologique singulière de cet été. La température anormalement élevée de la surface méditerranéenne a engendré une anomalie positive, intensifiant l’évapotranspiration (le passage combiné de l’eau liquide à l’état gazeux à la surface terrestre par l’évaporation et la transpiration des végétaux) et augmentant la teneur en vapeur d’eau atmosphérique.
Là aussi, ce phénomène a alimenté la formation de nuages et les précipitations sur l’Hexagone, s’inscrivant dans un contexte plus large d’interactions océan-atmosphère complexes comme décrit précédemment.
Une dépression atmosphérique tenace sur l’Europe occidentale a entravé le passage des anticyclones entre fin mai et début juin, maintenant des conditions humides et pluvieuses sur une bonne partie du territoire français. Ces anomalies barométriques ont été un facteur clé dans la persistance de conditions météorologiques instables.
Les influences locales
À l’échelle locale, le relief façonne également le climat local, et les zones montagneuses françaises ont exacerbé les précipitations ; on appelle ce phénomène : l’effet orographique. Imaginez une masse d’air chargée d’humidité, glissant sur les plaines, jusqu’à ce qu’elle rencontre soudainement un obstacle : une montagne. Contraint de s’élever, cet air s’engage dans une ascension qui le transforme progressivement. Au fur et à mesure qu’il grimpe, sa température chute, entraînant le passage de la vapeur d’eau en gouttelettes qui, rassemblées, forment des nuages puis se déversent en pluie.
En France, ce phénomène prend une ampleur particulière grâce à la présence de massifs imposants comme les Alpes ou le Massif central. Ces géants de pierre interceptent les flux d’air océanique, généralement venus de l’ouest, les forçant à s’élever brusquement. Cette ascension rapide déclenche un refroidissement intense, provoquant une condensation massive de la vapeur d’eau. Il en résulte des précipitations copieuses, expliquant ainsi les records pluviométriques fréquemment enregistrés dans ces régions montagneuses.
L’été que nous connaissons cette année est la parfaite illustration de ce que peut provoquer une combinaison de facteurs à grande échelle (CGA, ONA, PDO, ENSO), moyenne échelle (réchauffement de la Méditerranée) et petite échelle (particularités géographiques locales). Plusieurs études, grâce à l’utilisation de simulations climatiques, montrent que le changement climatique est susceptible d’augmenter l’intensité des précipitations extrêmes en France. L’est et le sud du pays seraient les zones les plus concernées. Toutefois, il n’y a pas encore de consensus scientifique solidement établi à ce propos et les recherches continuent. Nous devrons donc certainement nous habituer à ce type d’anomalie climatique. Désormais, il ne nous reste plus qu’à attendre la prochaine canicule !
- Le début de l’été 2024 en France a été marqué par des précipitations inhabituelles et des températures inférieures à la normale.
- La circulation atmosphérique globale, les oscillations de la pression atmosphérique et le réchauffement climatique ont contribué à ces conditions inhabituelles.
- D’autres conditions locales ont également joué un rôle important, dont le relief montagneux français qui a forcé l’air humide à s’élever et à se condenser.
📍 Pour ne manquer aucune actualité de Presse-citron, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.
Source: Pourquoi l’été n’est-il pas encore arrivé ?
Website: www.presse-citron.net